Crise financière : quelles conséquences sur l’épargne des Français ?

Crise financière : quelles conséquences sur l’épargne des Français ?

La chute des marchés pour cause de coronavirus va affecter une partie de l’épargne des Français par le biais de l’assurance-vie.

Même pour ceux qui ont connu les krachs boursiers depuis 1987, celui de 2020 est inédit. En un mois, le CAC 40 a perdu plus de 37 % par rapport à son plus haut atteint le 19 février. « C’est la première fois qu’une crise sanitaire est à l’origine d’une crise financière. On va dans l’inconnu », s’inquiète Fabrice de Cholet, PDG de la société de gestion Cholet Dupont. Pourtant, cette chute ne semble pas susciter de panique chez les épargnants. « Nos clients sont philosophes et résignés, ils sont plus concentrés sur des problèmes sanitaires que financiers », déclare Meyer Azogui, président de Cyrus Conseil, un des plus gros cabinets de gestion de patrimoine indépendants de la Place.

Il est aussi vrai que relativement peu de Français ont investi directement en actions, comme ce fut le cas en 1987, après la vague de privatisations d’entreprises publiques. La crise financière de 2008 a définitivement brouillé l’épargnant français avec la Bourse.

Même après le succès relatif, en novembre 2019, de la mise en Bourse de la Francaise des jeux, le nombre d’actionnaires individuels est estimé à un peu plus de 3 millions, loin des 7 millions de 2006. Pour autant, les portefeuilles d’actions ou les fonds détenus par les particuliers enregistrent des pertes de 20 % à 40 % depuis le début de l’année. Et la chute des marchés va affecter une partie de l’épargne des Français par le biais de l’assurance-vie, leur placement préféré, avec 1 789 milliards d’euros d’encours.

Mouvement de décollecte

Au cours des quatre derniers mois de 2019, les Français ont, en effet, dans le cadre de l’assurance-vie, privilégié des supports investis en Bourse. Ces derniers ont représenté près de 35 % de la collecte, selon des chiffres de la Fédération française de l’assurance. Un niveau en nette progression. Il faut dire que banquiers et assureurs les incitaient à le faire en raison de la faiblesse des taux d’intérêt qui affecte le rendement du fonds en euros. « Les clients sont de plus en plus souvent incités à orienter tout ou partie de leur épargne en assurancevie vers des supports en unités de compte plutôt que vers des supports en euros », observait l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution dans un communiqué publié le 10 mars.

Douchés par la brusque chute des marchés, les épargnants qui viennent d’investir dans ces supports pourraient être tentés de se réorienter vers des produits dont le capital est garanti, comme les fonds en euros. Ce support présente l’avantage de garantir le capital déposé et permet la capitalisation des intérêts acquis annuellement. Toutefois, ce fonds, qui est constitué à hauteur d’environ 80 % d’obligations d’Etat ou d’entreprises, pourrait pâtir de la tempête actuelle. Si les taux d’intérêt restent bas, ses rendements devraient continuer à baisser inexorablement. Le secteur n’est pas non plus à l’abri, en cas d’une crise des dettes dans la zone euro, de voir les particuliers retirer tout ou partie de leur épargne. Un mouvement de décollecte qui pourrait fragiliser les assureurs.

La crise des marchés va avoir des conséquences durables sur les économies des Français. Ils pourraient continuer à faire gonfler leur épargne dite de précaution : les sommes placées sur les comptes courants ou conservées en liquide atteignaient 603,8 milliards d’euros, fin septembre 2019, quasi deux fois plus qu’il y a dix ans, selon les derniers chiffres de la Banque de France. L’encours du livret A a, lui, dépassé, en janvier, les 300 milliards d’euros, un niveau record. Autant de sommes qui ne sont pas affectées par le plongeon des indices boursiers.

« Je déconseille d’investir dans la pierre »

La pierre, valeur refuge aux yeux des Français, risque aussi de perdre de son lustre. Ces dernières années, beaucoup d’assureurs-vie proposent dans leurs contrats des supports investis dans des sociétés civiles de placement immobilier (SCPI). Ces produits étaient présentés comme une alternative au fonds en euros, car ils offraient des rendements sensiblement supérieurs.

En 2019, 8,6 milliards d’euros ont été collectés sur ces placements, un record. « Aujourd’hui, je déconseille d’y investir », note Grégory Lecler, gérant au sein du cabinet Prudentia Patrimoine. Ces sociétés misent principalement dans les murs de commerces et les bureaux, qui seront affectés par la crise économique qui se profile.

Jeudi 19 mars, Frédéric Puzin, président de Corum, a indiqué dans un courrier à ses clients que, « pour la première fois depuis neuf ans, [ils] auron[t] des difficultés cette année à tenir tous [leurs] objectifs ». Interrogé, celui-ci a précisé : « Si 20 % de nos locataires n’étaient pas en mesure de régler leurs loyers pendant douze mois, le rendement de la SCPI Corum Origin pourrait se situer entre 4,6 % et 5 %, contre un objectif de 6 %. Pour le moment, seulement 6 % de nos locataires nous ont indiqué avoir des difficultés avec des demandes de report de loyer allant de deux à quatre mois. » D’autres SCPI, dont les rendements sont déjà inférieurs à 4 %, pourraient se trouver dans des situations bien plus délicates.

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