Les épargnants vont devoir changer leurs habitudes

Les épargnants vont devoir changer leurs habitudes

Taux bas voire négatifs, réforme de l’épargne avec la loi Pacte, autant d’évènements qui chamboulent les habitudes bien ancrées des épargnants Français, encore trop investis sur les placements sans risque. Tour d’horizon de ce qui change pour l’épargnant, des nouveaux supports accessibles et des raisons de s’y intéresser.

Comme le rappelait Bruno Le Maire, Ministre de l’économie et des Finances lors de la 11eme conférence internationale de l’assurance, nous vivions dans un « contexte économique radicalement nouveau ». Durant les trente dernières années, l’épargnant Français a bénéficié d’un cadre favorable dans lequel les produits ne présentant aucun risque d’investissement, comme le livret A ou le fond en euros d’une assurance vie, se sont révélés très rentables. En 2008, le Livret A affichait un rendement de 4 % et les fonds en euros étaient aux alentours de 3,90 %. Presque 12 ans plus tard, la rémunération des livrets réglementés est tombée à 0,75 %, et pourrait même chuter à 0,50 % dans quelques mois. Concernant le fonds en euros, le rendement moyen en 2018 a été de 1,80 %. De nombreux assureurs ont annoncé à la rentrée que la rémunération des fonds en euros allait connaitre une baisse significative au titre de l’année 2019.  Pour L’épargnant, il n’y a de raisons de paniquer mais plutôt de revoir ses habitudes d’investissement.

La fin d’une ère pour le fonds en euros

Ce sujet de la baisse des placements sans risque n’est pas en soi nouveau mais le contexte des taux bas lui redonne une acuité particulière. C’était l’un des thèmes abordés lors de la table ronde organisée à l’occasion des « Investor Awards » : « taux bas, nouvelle fiscalité et réforme des retraites : quelles perspectives pour l’épargne des Français ? ». « La baisse des rendements sur le fonds en euros c’est une histoire qui dure depuis un certain temps. Il faut désormais écrire un nouveau chapitre et permettre aux épargnants de se repositionner et d’investir dans l’économie productive », précise Lionel Corre, sous-directeur assurance à la Direction Générale du Trésor, à l’occasion de la table ronde. Pour autant cela ne signifie pas que les fonds euros sont à jeter aux oubliettes. Comme l’a rappelé Bruno Le Maire lors de la 11eme conférence internationale de l’assurance le 25 octobre 2019, le fonds euros repose sur trois piliers : la sécurité, la liquidité et le rendement. « Le fonds en euros reste pertinent et a vocation à garder une place importante dans l’épargne des Français, qui ont besoin de stabilité et de prévisibilité ». Mais dans un contexte où le modèle économique des fonds en euros est mis à mal par les taux d’intérêts négatifs. Une réforme de leur fonctionnement parait inéluctable. Mais elle se fera « progressivement » comme l’a indiqué le Ministre. Notamment par la promotion de nouveaux supports d’investissements.

La promotion de l’euro-croissance avec la loi Pacte

Crées en 2014, les supports Euro-croissance sont une solution alternative au « tout fonds euros ». Ils ont vocation à orienter l’épargne des ménages vers les entreprises et pousser les investisseurs à intégrer plus d’unités de comptes dans leur allocation d’actifs. Toutefois pour les rassurer et leur permettre de bénéficier d’une sécurité à laquelle ils sont attachés, les fonds euro-croissance bénéficient d’une garantie sur les sommes versées mais qui n’est pas acquise immédiatement. Il faut que l’épargnant attende au minimum huit ans pour bénéficier de cette garantie du capital. Durant l’intervalle, l’assureur pourra aller chercher du rendement sur des supports plus rémunérateurs mais aussi plus volatils. Si jusqu’à présent le produit n’avait pas vraiment rencontré son public, l’adoption de la loi Pacte a vocation à lui donner un second souffle. En effet la nouvelle mouture de l’euro-croissance sera plus transparente pour l’assuré en lui permettant de connaitre à tout moment le rendement du support. Ce qui n’était pas le cas auparavant. « C’est un changement complet qui donne de la lisibilité à l’épargnant. Cette transparence devrait contribuer au succès du produit », indique Bruno Le Maire.

A savoir

Des épargnants accrocs aux produits de taux

Les épargnants Français sont plus fourmis que cigales puisqu’ils épargnent en moyenne 15 % de leurs revenus. Selon l’AMF : l’assurance vie (fonds en euros plus les unités de comptes) représente 49 % des encours des placements financiers des ménages. Le total des sommes placées en assurance-vie représente 1.700 milliards d’euros dont 1.400 investis sur les fonds en euros des contrats. Les liquidités et l’épargne bancaire représentent 36 % des encours. La part des valeurs mobilières dans l’épargne des ménages est de 15 % (hors actions non cotées). Cette part monte à 23 % en intégrant les unités de compte de l’assurance vie. Les actions détenues en direct représentent 6 %. La détention indirecte est plus importante : elle se fait essentiellement au travers de l’assurance vie et des placements collectifs (y compris dans le cadre de l’épargne salariale). Au total, la part d l’épargne financière des ménages placées sans risque représente environ 77 % de l’encours des placements financiers des ménages français.

Une diversification en assurance vie grâce au capital investissement

Ce n’est pas le seul apport de la loi Pacte concernant l’assurance vie. Elle est également venue renforcer la loi Macron de 2015 qui avait ouvert la possibilité à l’assuré d’investir dans des sociétés non cotées via son contrat en autorisant la compagnie à le régler avec les titres et parts des sociétés en question. Une manière de diversifier les possibilités d’investissement accessibles dans une assurance vie, en plus des unités de comptes, que l’on retrouve dans un contrat multi supports classique. Si l’offre de parts de sociétés non cotés (on parle dans le jargon de capital-investissement ou de private equity) reste encore cantonnée à des contrats destinés à une clientèle fortunée, certains assureurs commencent à proposer des offres plus accessibles pour une plus large clientèle.

Ne pas confondre FPCI et FCPI

Mieux, un décret du 15 novembre, issu de la loi Pacte permet désormais aux assurés d’investir dans des parts de Fonds Professionnels de Capital Investissement (FPCI). Attention à ne pas les confondre avec les FCPI (Fonds Communs de Placement dans l’Innovation) dont l’objectif principal est de réduire le niveau d’impôt sur le revenu. Le FPCI est un véhicule composé d’au moins 50 % d’actifs non cotés Leur univers d’investissement est plus large que celui des FCPI. Il reste néanmoins encore destiné à des investisseurs avertis. Le décret plafonne également le montant consacré au capital investissement : désormais, les épargnants qui investissent plus de 100.000 euros ne peuvent pas consacrer plus de 50 % de l’encours de leur contrat à des FPCI. En dessous de 100.000 euros, l’assuré ne peut pas aller au-delà de 10% de l’encours.

 Basculer au fur et à mesure vers les UC

Si les professionnels de l’épargne se montrent plutôt satisfaits des apports de la loi Pacte, reste à savoir comment les épargnants vont s’approprier ces nouvelles possibilités. La bascule ne se fera pas du jour au lendemain, surtout si les performances du fonds en euros continuent d’être jugées satisfaisantes par l’épargnant. Mais selon les professionnels du secteur de l’épargne cette transition vers des nouveaux supports parait inéluctable. Selon eux il faut surtout que les distributeurs fassent preuve d’une plus grande pédagogie en expliquant les avantages de la diversification à leurs clients et de permettre aux épargnants de rentrer sur les marchés selon leurs capacités financières. A cet égard, verser des petits montants régulièrement peut s’avérer vertueux sur le long terme en lissant les points d’entrée sur les marchés. Un comportement d’épargne qu’il est déjà largement possible de suivre grâce aux options de gestion intégrées dans les contrats d’assurance vie en ligne. Le plus dur en la matière étant toujours de faire le premier pas. D’ailleurs, les pouvoirs publics se sont également emparé du sujet, puisqu’il a été décidé à l’issue du dernier Comité stratégique d’éducation financière, coordonnée par la Banque de France d’organiser dans tout le territoire des « rendez-vous de l’épargne » à destination du grand public « afin d’apporter des éclairages sur l’évolution du contexte économique de l’épargne et des produits d’épargne ».

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