Les questions que pose la réforme des retraites présentée par Marine Le Pen

Les questions que pose la réforme des retraites présentée par Marine Le Pen

Les questions que pose la réforme des retraites présentée par Marine Le Pen

Commencer à travailler plus tôt pour partir à la retraite plus tôt. C’est le mot d’ordre de la réforme des retraites présentée par Marine Le Pen, jeudi 17 février, à l’occasion d’une conférence de presse. Les nouvelles règles du jeu que propose la candidate RN sont les suivantes : si vous avez commencé à travailler entre 17 et 20 ans, vous pourrez partir avec une retraite à taux plein dès 60 ans en ayant cotisé un minimum de 40 annuités. À 20,5 ans vous pourrez partir à 60 ans et trois trimestres et à 21 ans un départ sera possible à 61,5 ans.

Au-delà, si vous êtes entré dans la vie active entre 21,5 ans et avant 24 ans et demi, l’âge légal de départ à la retraite restera fixé à 62 ans et pour partir avec un taux plein, vous devrez avoir cotisé entre 160 et 168 trimestres. “Plus l’âge d’entrée dans l’emploi sera bas, plus le nombre de trimestres nécessaire pour bénéficier du taux plein sera, lui aussi, faible”, a précisé la candidate du Rassemblement national. Dernier détail de ce chantier : contrairement à la réforme Touraine qui prévoit de pousser jusqu’à 43 ans de cotisation pour obtenir le taux plein pour les générations nées à partir de 1973, Marine Le Pen entend abaisser ce seuil à 42 ans.

Fin du compte professionnel de prévention

On l’aura compris, la volonté affichée de Marine Le Pen est d’inciter les jeunes à entrer le plus tôt possible sur le marché du travail. Une intention louable sur le papier, mais qui pose un certain nombre de questions. “Il faut d’abord bien définir ce que veut dire commencer à entrer dans la vie active”, prévient François Ecalle, ancien rapporteur général de la Cour des comptes et président de Fipeco, site d’informations sur les finances publiques. Aujourd’hui, il existe déjà un dispositif baptisé “carrière longue” qui permet de partir à la retraite plus tôt pour ceux qui ont commencé à travailler jeune. Pour en bénéficier, il faut avoir travaillé au moins 4 trimestres avant 20 ans. “Est-ce que par exemple on considère qu’un cadre qui a fait une formation en alternance avant ses 20 ans pourra partir à la retraite à taux plein avec 160 trimestres”, s’interroge Henri Sterdyniak, économiste à l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) et membre du collectif des économistes atterrés. “Même question si vous avez fait un job d’été avant vos 20 ans”, ajoute-t-il.

Avec cette réforme, le Rassemblement national fusionne en fait deux mesures : le compte professionnel de prévention, qui permet en fonction de certains critères (travail de nuit, sous des températures extrêmes, exposition au bruit…) de partir plus tôt à la retraite, et le dispositif de carrière longue. Ce qui entraîne, là encore, d’autres effets de bord. Ainsi ceux qui ont commencé à travailler après 21,5 ans mais qui ont exercé une activité dite pénible ne pourront plus, comme c’est le cas aujourd’hui, partir à la retraite avant 62 ans. “Il est vrai que même si ces deux dispositifs sont différents, le plus souvent il y a une corrélation car ceux qui ont commencé à travailler tôt exercent des métiers dont certains critères entrent dans le compte de prévention”, reconnaît François Ecalle. Mais se pose cependant la question de la différence entre le public et le privé. “En conservant les régimes spéciaux et en supprimant le compte de prévention, on ne règle pas la différence de prise en compte de la pénibilité entre les fonctionnaires qui pourront toujours partir plus tôt à la retraite et les salariés du privé qui ne verront plus leur pénibilité considérée. C’est le cas par exemple pour les aides soignants”, estime Henri Sterdyniak.

Pas de changement pour les carrières hachées

Autre écueil du plan de Marine Le Pen : la réforme annoncée laisse aussi de côté ceux qui ont eu une carrière hachée. Même si la durée de cotisation pour obtenir un taux plein était réduite de 43 à 42 ans… ils devront toujours attendre l’âge de 67 ans pour bénéficier automatiquement d’une retraite à taux plein. C’est le cas par exemple d’une femme qui a exercé son activité à temps partiel ou qui a cessé son activité pour élever leur enfant. Même si elle a commencé à travailler avant 20 ans, elle n’aura pas forcément cotisé pendant 40 ans et ne pourra donc pas partir à la retraite à 60 ans. “Je ne compte pas toucher à cet âge automatique du taux plein à 67 ans, a précisé Marine Le Pen. Mais je ne perds pas de vue qu’il pourra y avoir une dynamique d’amélioration qui permettrait de l’abaisser”, a-t-elle toutefois envisagé. “Pour aider ces carrières hachées il faudrait par exemple pour cela faire évoluer les règles de validation des trimestres”, note Dominique Prévert, du cabinet spécialisé Optimaretraite. Aujourd’hui pour valider un trimestre, il faut avoir travaillé l’équivalent de 150 heures payées au Smic, soit 1.585,50 euros.

Enfin la question que pose cette réforme est le lien entre la retraite de base et la complémentaire. L’État ne peut agir que sur la retraite de base. Si l’on prend l’exemple de l’Agirc-Arrco, régime de retraite des salariés du privé, une baisse du nombre d’années de cotisations pour obtenir une retraite à taux plein pourrait avoir des conséquences sur les finances de ce régime. Aujourd’hui il existe en effet un dispositif de bonus/ malus, mis en place pour assurer l’équilibre du régime. Si par exemple vous partez à 62 ans avec le taux plein, votre retraite complémentaire subit une décote de 10 % pendant 3 ans. Il faut travailler une année supplémentaire pour obtenir le taux plein pour votre retraite complémentaire.

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Ainsi, pour une personne née en 1973 ou après, elle devra avoir cotisé 44 ans (43 années pour une retraite de base à taux plein plus une année pour une retraite complémentaire à taux plein). En baissant la durée de cotisation à 42 ans pour obtenir le taux plein, mécaniquement pour avoir une retraite complémentaire à taux plein, il ne faudra plus cotiser 44 ans mais 43 ans. Financièrement cela veut donc dire moins d’entrées de cotisations pour le régime Agirc-Arrco. “Il n’est pas sûr que les partenaires sociaux qui gèrent l’Agirc-Arrco apprécient ce type de mesure”, estime Nicolas Marques, économiste et directeur général de l’Institut Molinari.

Source Capital.fr

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