Réforme des retraites : la visite médicale du travail aussi réalisée par des kinés ou infirmiers ?

Réforme des retraites : la visite médicale du travail aussi réalisée par des kinés ou infirmiers ?

Réforme des retraites : la visite médicale du travail aussi réalisée par des kinés ou infirmiers ?

Transférer les compétences médicales pour gommer les manques. Telle semble être la stratégie du gouvernement pour garantir un suivi médical aux salariés exposés à la pénibilité. Un de ses amendements déposé au projet de loi de financement de la Sécurité sociale rectificative (PLFSSR) propose en effet que les visites médicales puissent être réalisées par d’autres professionnels de santé que les médecins du travail. Comme les infirmiers, les kinésithérapeutes ou les médecins traitant. Une mesure qui vise, en quelque sorte, à pallier le déficit de médecins du travail en France.

>> Notre service – Faites des économies en testant notre comparateur d’Assurances Santé

Selon les chiffres de l’Ordre des médecins, l’Hexagone totalise, au 1er janvier 2022, seulement 4.439 médecins du travail sur son sol. Un nombre en baisse d’environ 20% depuis dix ans. Et c’est sans compter les fortes disparités territoriales. Si Paris compte 26,1 médecins du travail pour 100.000 habitants, de nombreux départements n’en ont même pas 10 pour 100.000. 8,1 dans les Côtes d’Armor, 6,4 dans l’Oise, 5 dans l’Allier… voire 0,8 en Haute-Loire, territoire qui a vu son nombre de médecins du travail reculer de 86% depuis 2010.

Il faut dire que plus de 60% des médecins du travail en poste en France ont plus de 50 ans. La médecine du travail “est une des spécialités les moins choisies par les internes en fac de médecine. Peut-être qu’il y a un sujet de maturité qui fait qu’elle ne semble pas la plus attractive et la plus en phase avec leur vision du métier”, pointait du doigt Arnaud Robinet, président de la Fédération hospitalière de France (FHF) lors d’une conférence de presse le 1er février. La FHF appelle ainsi le gouvernement à engager un plan spécifique d’attractivité de la filière santé au travail.

“Ce qu’il faut, c’est déployer une logique d’équipes pluridisciplinaires et permettre que le suivi soit réalisé par d’autres professionnels de santé (médecins, infirmiers, kinésithérapeutes, etc.)”, avance le gouvernement dans son amendement. L’exécutif s’appuie notamment sur la loi santé au travail de 2021 qui a ouvert la voie au partage des tâches entre les professionnels de santé.

“C’est un dévoiement total de la médecine”

Mais cette mesure “n’a absolument aucun sens” aux yeux du Dr Jean-Michel Sterdyniak, secrétaire général du syndicat national des professionnels de santé au travail. “Olivier Véran [le porte-parole du gouvernement, ndlr] a déjà fait allusion à ce que les médecins généralistes traitants puissent intervenir vu la pénurie de médecins du travail. Or on manque aussi de généralistes !”, s’exclame-t-il.


À LIRE AUSSI

Un médecin traitant pour chaque patient en ALD, une promesse tenable ?

Et ce n’est pas l’élargissement des compétences des infirmiers et des kinésithérapeutes qui changerait la donne. “Les infirmières sont déjà débordées, elles n’ont pas le temps pour ça. Quant aux kinés, est-ce vraiment leur rôle de faire ces visites ?”, s’interroge le médecin du travail. Le gouvernement ferait mieux, selon lui, de s’attaquer au bien-être des travailleurs. “C’est un dévoiement total de la médecine que de contraindre des soignants à constater l’usure professionnelle. Il faut surtout obliger les entreprises à améliorer les conditions de travail des salariés”, affirme-t-il.

Mieux prévenir les accidents du travail et maladies professionnelles

Jean-Michel Sterdyniak s’appuie notamment sur un rapport de la Cour des comptes paru le 20 décembre dernier. Les Sages de la rue Cambon appellent en effet à “mettre en œuvre sans tarder un programme de contrôle du respect par les employeurs de leurs obligations relatives au compte professionnel de prévention”. Ils suggèrent également d’inciter davantage les entreprises à la prévention des accidents du travail en augmentant leur taux de cotisation en cas de “sinistralité anormalement élevée dans son domaine d’activité”.


À LIRE AUSSI

Faut-il moins rembourser les médicaments pour éviter les pénuries ?

De telles mesures ne peuvent, cependant, produire des effets rapidement. À court terme, Jean-Michel Sterdyniak suggère au gouvernement et aux partenaires sociaux de “lister les métiers les plus pénibles” pour permettre aux salariés de partir à la retraite de manière anticipée, sans qu’ils aient à consulter un professionnel de santé en fin de carrière. “Ça ne sert à rien pour une aide-soignante de faire cette visite à 61 ans. Elle est déjà usée professionnellement”, souffle le médecin du travail.

C’est pourtant à cet âge-là que le gouvernement a programmé la visite médicale obligatoire pour évaluer la retraite anticipée. Si le professionnel de santé au travail donne son aval, alors le salarié pourrait partir à la retraite à taux plein dès ses 62 ans. Reste à savoir dans quel état de santé.

Source Capital.fr

Si vous avez aimé cet article, partagez le !

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.