Départ à la retraite : comment le patronat veut changer les règles du jeu à son avantage

Départ à la retraite : comment le patronat veut changer les règles du jeu à son avantage

La discussion est entrée dans le dur. Dans le cadre de la négociation sur le pacte de vie au travail, abordant notamment les questions d’emploi des seniors et de reconversion professionnelle, le Medef a fait parvenir un nouveau document de travail aux syndicats. Dans sa proposition d’accord sur le sujet, l’organisation patronale consacre un article pour «faciliter les aménagements de fins de carrière par des dispositifs articulés les uns avec les autres afin de permettre le maintien en emploi». Elle avance plusieurs modifications pour les dispositifs de transition entre l’activité et la retraite.

La première proposition concerne l’ensemble des salariés puisqu’il s’agit de revoir les modalités de départ à la retraite. Aujourd’hui, lorsqu’il atteint l’âge légal, à taux plein ou non, un salarié peut demander sa retraite quand il le souhaite. Il doit cependant respecter un préavis d’un mois s’il a une ancienneté comprise entre six mois et deux ans, et de deux mois s’il est dans l’entreprise depuis plus de deux ans. Dans certains cas, négociés dans une convention collective, ces délais peuvent même être plus courts.

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Départ à la retraite : comment le patronat veut changer les règles du jeu à son avantage
Illustration Capital

Une demande pour une meilleure organisation

Or, pour l’organisation patronale, ce mode de fonctionnement «ne permet pas d’anticiper les impacts du départ sur l’organisation du travail, ni de faciliter les choix individuels du côté des salariés». Elle propose que, dans le cadre d’un entretien professionnel «renforcé» à 60 ans, soient évoquées avec le salarié ses velléités pour la fin de sa carrière et que la Caisse nationale d’assurance vieillesse (Cnav) communique à l’employeur, sauf refus explicite de la part du salarié, sa date prévisionnelle d’obtention du taux plein. «Cela va très loin, c’est une information personnelle qui doit rester à la main du salarié, estime Eric Courpotin de la CFTC. C’est comme si un employeur demandait à une femme quand elle allait faire un enfant.»

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Les syndicats apprécient peu la proposition d’autant que, couplée avec un autre projet, celui du CDI «fin de carrière» – contrat à durée indéterminée ouvert aux demandeurs d’emploi de 60 ans et plus inscrits à France Travail -, le cocktail contre le salarié pourrait être explosif. En effet, le Medef préconise que l’employeur puisse, lorsque le salarié qui a contracté ce nouveau type de CDI atteint l’âge du taux plein, le mettre à la retraite. «C’est tout bénéf’ pour les employeurs pour qui on crée un nouveau motif de licenciement», s’insurge Denis Gravouil de la CGT. En effet, dès que le salarié aura son taux plein, l’entreprise pourra le licencier sans préjudice. L’employeur n’aura pas à s’acquitter, comme c’est le cas aujourd’hui, d’une contribution de 30% sur l’indemnité versée en cas de mise à la retraite.

Des aménagements pour les fins de carrière

D’une manière plus générale, le Medef veut multiplier les possibilités de transition entre l’emploi et la retraite. Pour y arriver, il propose notamment de créer un temps partiel de fin de carrière. L’idée est de permettre aux salariés volontaires, en accord avec leur employeur, de passer à temps partiel jusqu’à leur âge de retraite à taux plein ou de basculer vers la retraite progressive, dispositif qui permet de réduire son activité en commençant à toucher une partie de sa retraite, uniquement accessible deux ans avant son âge légal de départ à la retraite.

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La mise en œuvre de ce temps partiel de fin de carrière devra être définie par accord d’entreprise ou de branche. Le Medef évoque cependant la possibilité d’utiliser une partie de l’indemnité de départ en retraite pour compenser la perte de revenu en passant à temps partiel. «Pour nous, c’est une ligne rouge. Cela équivaut à demander au salarié de payer pour aller travailler», dénonce Eric Courpotin. L’organisation patronale propose, en contrepartie de la suppression de la contribution de 30% à la charge de l’employeur lorsque c’est lui qui met un salarié à la retraite, d’inciter les entreprises à maintenir les cotisations retraite au-delà du salaire à temps partiel. «Ce qui va contribuer à réduire les finances des caisses de retraite», regrette le syndicaliste.

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Un assouplissement du cumul emploi retraite

Plutôt que cette proposition de temps partiel en fin de carrière, les syndicats (CFDT, CGT, FO, CFE-CGC et CFDT), dans un communiqué commun publié ce mardi 19 mars, demandent de permettre de prendre une retraite progressive à partir de 60 ans, alors qu’avec le report progressif de l’âge légal à 64 ans, elle sera bientôt ouverte uniquement à partir de 62 ans. De son côté, le patronat, pour encourager le recours à ce dispositif, préfère une mesure plus technique : les cotisations retraite du salarié pourraient être en partie prises en charge par l’employeur, ce qui augmenterait sa rémunération nette.

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Autre dispositif que le patronat souhaite remodeler : le cumul emploi retraite. Aujourd’hui, si vous prenez votre retraite alors que vous n’avez pas encore le taux plein et que vous souhaitez reprendre une activité chez votre ancien employeur, vous devez attendre six mois pour le faire. Pour le Medef, ce délai «pénalise le retraité qui pourrait manquer une opportunité d’emploi», est-il écrit dans l’avant-projet d’accord.

Un constat que ne partagent pas les syndicats. «C’est un effet d’aubaine pour les entreprises», cingle Denis Gravouil. La crainte des syndicats : que les entreprises en profitent pour réembaucher directement des cadres supérieurs venant de partir à la retraite. «Cela va leur permettre de payer moins leurs cadres qui, eux, seront mieux rémunérés en cumulant emploi et retraite. Le tout sera financé par la caisse de retraite.» Des divergences de point de vue que les partenaires sociaux mettront sur la table ce mercredi 20 mars lors de la nouvelle séance de négociation.

Source Capital.fr

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