L’avantage fiscal pour les transmissions d’entreprises familiales sur la sellette

L’avantage fiscal pour les transmissions d’entreprises familiales sur la sellette

L’avantage fiscal pour les transmissions d’entreprises familiales sur la sellette

Le Pacte Dutreil est-il en danger ? Le régime fiscal de faveur pour les transmissions d’entreprises est en tout cas dans le viseur de Bercy : ses commentaires publiés le 6 avril 2021 au Bulletin officiel des finances publiques (Projet de BOFiP-Impôts) laissent en effet planer une véritable incertitude quant à l’avenir de ce régime plébiscité par les chefs d’entreprise au moment de la transmettre à leurs descendants. Les précisions apportées par la Direction générale des finances publiques (DGFiP), en consultation publique jusqu’au 6 juin, pourraient considérablement modifier les conditions requises pour bénéficier d’un abattement de 75% sur les droits de donation. Sources de “beaucoup d’inquiétudes” selon François Landais, directeur fiscal associé au cabinet d’expertise comptable, de conseil et d’audit Fiteco, ces commentaires remettraient, purement et simplement, en cause un avantage fiscal essentiel aux entreprises familiales qui souhaitent le rester.

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Conditions actuelles du Pacte Dutreil

Actuellement, les propriétaires d’une entreprise qui souhaitent transmettre ce bien professionnel à leurs héritiers peuvent réduire le montant des droits à payer en activant le Pacte Dutreil. Ils doivent pour cela respecter plusieurs conditions : leur entreprise doit exercer une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale ou ayant une activité de holding animatrice. Par ailleurs, le chef d’entreprise s’engage collectivement, avec un ou plusieurs associés/actionnaires, à conserver ses titres pendant deux ans avant la transmission de ses parts. Cet engagement doit porter sur un minimum de 17% des droits financiers et 34% des droits de vote (respectivement 10% et 20% si la société est cotée). A la transmission des titres, soit au moment du décès du chef d’entreprise ou de la donation, les héritiers ou donataires (qui reçoivent la donation) doivent à leur tour s’engager à détenir pendant quatre années les titres reçus. Le point de départ de ce délai court à partir de l’extinction de la période de deux ans d’engagement collectif. Enfin, l’un des associés qui a signé cet engagement collectif ou, à défaut, l’un des héritiers ou donataires, doit, pendant une durée de 3 ans à compter de la transmission à titre gratuit, exercer une fonction de direction au sein de l’entreprise. Il peut s’agir d’une “fonction de gérant, nommé conformément aux statuts d’une société à responsabilité limitée ou en commandite par actions, d’associé en nom d’une société de personnes ou de président, directeur général, président du conseil de surveillance ou membre du directoire d’une société par actions”, détaille l’article 975 du Code général des impôts. Pour une entreprise individuelle, il s’agit de l’exploitation de l’entreprise.

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Si l’ensemble de ces conditions est respecté, chaque héritier ou donataire bénéficie d’un abattement de 75% sur les titres ainsi acquis. “Ce dispositif permet de réduire le coût et d’assurer la transmission familiale de l’entreprise”, explique François Landais. L’expert cite ainsi le cas d’un Pacte Dutreil qui doit permettre à l’un de ses clients de voir ses droits de donation passer de 28 millions d’euros (somme dont il ne dispose aucunement par ailleurs) à 5 millions.

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Un impact formidable pour une petite entreprise

Plus parlant encore, François Landais donne l’exemple d’un couple dont les membres, âgés de 59 et 60 ans, détiennent chacun 50% de leur SARL valorisée 2 millions d’euros. Ils ont deux enfants à qui ils souhaitent transmettre leur entreprise, à parts égales. S’ils ne préparent pas la transmission de leur entreprise, chacun des enfants devra alors s’acquitter de droits de donation à hauteur de 156.390 euros (312.780 euros au total). En préparant un Pacte Dutreil, la facture tombera alors à… 3.194 euros (6.388 euros au total), soit 49 fois moins ! Car à l’abattement de 75% des droits de donation s’ajoute celui de 100.000 euros (abattement forfaitaire entre parents et enfants), ainsi qu’une réduction d’impôt de 50% sur ces mêmes droits, la donation étant réalisée avant les 70 ans du chef d’entreprise.

Un joli coup de pouce fiscal, donc, qui permet aux enfants de notre couple d’essuyer une fiscalité presque indolore au vu des montants concernés, sans avoir à assumer immédiatement la direction de l’entreprise. Mais surtout, et c’est bien là l’essentiel, de ne pas mettre l’entreprise sous la pression de devoir verser des dividendes importants chaque année afin d’assurer le paiement des droits de donation. François Landais insiste sur le fait que “la trésorerie est bien plus utile au sein des entreprises, pour investir, innover, embaucher et se développer, plutôt que d’être consacrée au paiement de droits de donation qui n’apporteront aucun carburant au moteur de l’économie française, et risqueraient bien au contraire de fragiliser le tissu des entreprises familiales”.

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Le bénéficiaire du Pacte, bientôt dirigeant forcé ?

Mais ces conditions favorables pourraient très prochainement appartenir au passé. Car comme le relève François Landais, Bercy penche désormais pour un durcissement de la règle. Dans ses commentaires, l’administration fiscale précise : “Dès lors que l’ensemble des titres soumis à engagement a été transmis, la direction de la société doit être assurée par l’un des héritiers, légataires ou donataires.” En d’autres termes, une telle condition “exigerait que les enfants prennent obligatoirement la direction de l’entreprise”, éclaire le directeur fiscal associé de Fiteco. Une conséquence qui ne coule pas de source dans de nombreuses entreprises où héritiers ou donataires n’ont pas vocation à assumer dès à présent la direction. Car “avoir les parts de l’entreprise est une chose, en prendre la direction en est une autre”, assène François Landais. En outre, la potentielle incapacité du bénéficiaire de l’opération, – dans le cas d’un enfant mineur ou d’une personne totalement profane aux activités de l’entreprise -, amènerait à devoir placer une telle personne à la tête de l’entreprise. Ce qui pourrait avoir des conséquences dramatiques sur cette dernière et être source de conflit en son sein, la direction future de l’entreprise pouvant à l’origine être dévolue à un cadre supérieur récompensé pour la qualité de son travail. Or en suivant à la lettre les commentaires de Bercy, c’est bien un risque qui pèse sur la pérennité des entreprises. “C’est désormais la fiscalité qui va dicter les transmissions”, peste François Landais. Au risque donc de mettre en péril la santé de l’entreprise.

Le dirigeant estime par ailleurs que la décision de Bercy, si elle vient à être confirmée, pourrait remettre en cause les opérations déjà en cours. “L’administration fiscale pourrait être tentée de remettre en cause les pactes Dutreil déjà signés”, déplore-t-il. Si, en juin, à la fin de la consultation publique, la position de Bercy restait inchangée, une potentielle annulation de l’abattement de 75% sur les droits de donation serait à craindre pour les donations à venir. Promesse d’un été fiscalement chaud ?

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Source Capital.fr

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